Il faisait étrangement bon, pour une soirée de printemps. Nous étions une dizaine environ à être venus sur la falaise pour profiter de la douce température. La plupart étaient assis autour d'un grand feu de camp, discutant et riant bruyamment, tout en faisant griller des marshmallows. L'odeur du feu de bois et des sucreries se mélangeait en une odeur forte et enivrante. Je levai la tête. Le ciel était déjà sombre, alors qu'il n'était pourtant pas encore très tard. Je me remis à écouter la conversation, quand celle que je considérais comme ma meilleure amie m'interpella.

«  - Cat ! Tu peux allez chercher des marshmallows s'il-te-plait ? Il n'y en a plus !, me lança en criant Eden, une petite moue suppliante au visage.

- Ouais, j'y vais. »

Elle me fit un grand sourire, leva un pouce en l'air, et je pus lire sur ses lèvres « T'es la meilleure ! ». Je me levai en lui répondant par un petit sourire, et rattrapai au vol les clés qu'elle me lança. J'enfilais rapidement mon gilet qui était jusque-là simplement posé sur mes épaules, et me dirigeai vers les voitures garées à une centaine de mètres. Je marchai un moment, quand des frissons commencèrent à me parcourir.

« Il fait beaucoup plus froid quand on s'éloigne du feu, finalement... », murmurais-je pour moi-même. 

Je soupirai. À n'importe quel autre moment, j'aurais été très joyeuse – et aurais sûrement déjà un peu trop bu – mais aujourd'hui n'était définitivement pas mon jour. Enfin, il était bientôt terminé, et plus rien de mal ne pourrait m'arriver, n'est-ce pas ? Alors autant essayer de s'amuser. C'était Eden qui avait eu l'idée de venir ici. On était arrivé juste après les cours, et on avait passé toute la fin d'après-midi dans le lac en contrebas. La falaise était sûrement mon lieu préféré de cette ville, sans que je sache réellement pourquoi...
Une fois arrivée à destination, je déverrouillais la voiture et me dirigeai vers le coffre pour l'ouvrir. Je me penchais pour attraper un des sacs, quand des cris perçants retentirent. Je me figeais instantanément, puis me retournai vers la falaise, d'où provenaient les hurlements. Les filles devaient sûrement me faire une blague, pour m'effrayer. Oui, c'était typiquement leur genre... Mon cœur se calma quelque peu, et je poussais un soupir. N'étant néanmoins pas très rassurée, de saisir mon téléphone et appela Eden. Une sonnerie. Deux sonneries. Trois... Elle ne répondit pas, alors je réessayais. Cette fois-ci, elle décrocha. 

« - Eden, c'est franchement pas drôle. Vous m'avez fait peur ! Imagine, s'il vous arrivait vraiment quelque chose ?, je secouais ma tête, tout en parlant très vite. Il y eut un blanc de quelques secondes.

- Cat... J-je... Il y a une chose ici !, elle murmurait, mais sa voix semblait à la fois hystérique et terrifiée. Oh mon dieu, c'e-c'est horrible... Amanda et Beth... E-elles... Il les a attaquées ! Je me suis cachée derrière les rochers mais j’entends des cris c'est... c'est horrible ! Appelle la police Cat, vite ! »

Sa voix tremblante me dit qu'elle s'était mise à pleurer. Elle était complètement terrifiée, c'est certain. Cependant elle fait du théâtre alo-... J'entendis soudainement un grand cri, puis plus rien. Je sursautais, et hurlai dans le téléphone :

« - Eden ?! EDEN ! Réponds-moi je t'en prie ! Tu... »

La communication fut soudainement coupée. Je n'hésitais pas et me mis à courir comme une folle jusqu'au feu de camp. J’espérais pour elle que ce n'était pas une blague, sinon elle passerait un sale quart d'heure...

Je n'étais pas très endurante. Aux trois quarts du chemin, je n'avais déjà plus de souffle, et ralentis un peu malgré moi. Quand j'arrivais enfin, je voyais un peu flou et mes poumons étaient en feu. Je m'arrêtais net quand je vis à une dizaine de mètres, le feu de camp. Éteint. Une fumée s'en échappait encore, mais le feu était tout simplement éteint. Mon sang se glaça dans mes veines, et j'essayais de distinguer quelqu'un dans l'obscurité. Je lançai doucement, d'une voix tremblotante :

« Eden.. ? Kate... ? Il y a quelqu'un ? Si c'est une blague, ça n'a rien d'amu... »

J'avançais toujours en parlant, mais je me stoppais net quand je vis la scène qui s'offrait à moi. Mes yeux s'écarquillèrent, et l'horreur me saisit. Devant moi, il y avait mes amies, oui. Elles étaient mortes : égorgées. Toutes, sans exception. 

           PDV - Inconnu. 

Je n'en revenais toujours pas. Il m'avait trahi. Trahi, moi ! Oh, j'étais en colère, oui, très en colère. Me trahir était la chose la plus suicidaire qu'on pouvait faire. Et jouer un double jeu. Eh bien, disons que c'était pire. Mais le tuer ne m'avait pas apaisé. J'étais trop énervé pour cela : il fallait que j'aille me défouler. 

Une demi-heure plus tard...

Je ne lançais même pas un coup d’œil au spectacle macabre qui s'offrait à moi, trop occupé à chercher la dernière fille. J'essuyais distraitement de la main le sang qui coulait de ma bouche, et me dirigeait vers l'odeur humaine. Elle était derrière les rochers, à quelques mètres de moi. Je l'entendis parler, et tendis l'oreille. Elle était au téléphone, en pleure.

Un sourire se dessina sur mon visage, et je m'approchais à une vitesse humaine de son emplacement. En entendant mes pas, elle tourna la tête et essaya de se relever, mais pas assez vite. Je me jetais sur elle et enfouis mes crocs dans son cou pâle. Elle poussa un hurlement, puis, après fini, je plantais mon regard dans le sien et vis la vie partir de son être. Mon attention se reporta sur le téléphone, quand l'interlocutrice se mit à parler d'une voix horrifiée :

« - Eden ?! EDEN ! Réponds-moi je t'en prie ! Tu... »

L'écran de l'appareil affichait écrit en gros ¨Cat¨. Je l'écrasais dans ma main, avant de me relever. Mes yeux reprirent leur couleur habituelle, et je marchais en direction du feu de camp. Je l'éteints et fermai les yeux un moment, au bord de la falaise. La brise fraîche me fouettait le visage, et je me dis que j'étais enfin calmé. Mes yeux s'ouvrirent et fixèrent le ciel devant moi. Je comptais bien passer l'envie de me trahir à quiconque proche de moi, mais pour cela, il me fallait un plan. 
Je sentis une présence derrière moi, dans l'obscurité. 

« Eden.. ? Kate... ? Il y a quelqu'un ? Si c'est une blague, ça n'a rien d'amu... »

Je la coupai en entrant dans son champ de vision, mon sourire toujours accroché à mes lèvres. Il y en avait encore une. Tant mieux, je voulais rester prendre l'air encore un peu, et c'était là une parfaite distraction. Son regard rencontra le mien, et elle me fixa, horrifiée. C'était sûrement dû au sang. Mon sourire se renforça, et je lâchais dans un souffle :

« Comment t'appelles-tu ? »

         PDV – Catlyn.

« Comment t'appelles-tu ? », me demanda-t-il. 

Était-ce une blague ? Oh. Mon. Dieu. Un psychopathe meurtrier se tenait juste devant moi, à côté des cadavres de mes amies. J'avais l'impression de rêver, ou d'être dans une réalité parallèle. Ça ne pouvait être vrai, ce n'était pas possible ! Je reculais instinctivement d'un pas lorsque sa voix grave retentit dans l'air plein de tension. Devais-je répondre ? Il allait me tuer de toute façon...
Je n'avais pas peur, je n'étais pas effrayée, non. Oh, non. J'étais terrifiée. 
En voyant ma réaction, il s'avança doucement et planta son regard dans le mien. Il répéta sa question, en articulant un peu plus. Je pus alors remarquer -même si c'était complètement déplacé- qu'il avait un accent que je n'avais encore jamais entendu. 

«  Comment t'appelles-tu ? »

J'étais trop choquée pour répondre, mais je sentis, lorsqu'il prononça ces paroles, une sensation bizarre. C'était comme si j'étais... Obligée, de répondre. 

« Catlyn. », lâchais-je dans un murmure. 

Contre toute attente, il parut entendre et pencha légèrement la tête sur le côté. Mon corps, encore en état de choc, commença à se dégeler un peu et un instinct me poussa à partir en courant vers les voitures. Ce que je fis, évidemment. Je n'allais pas attendre bêtement qu'il m'égorge à mon tour... 

« Ne bouge plus. », dit-il d'une voix forte.

Comme avant, je lui obéis et me figeais sur place, dos à lui. Que...
Un souffle chaud vint soudainement s'écraser dans mon cou, et je fermai les yeux du plus fort que je le pouvais. C'est bon, il allait me tuer. Je tremblais malgré moi. Au bout de quelques secondes, je ne sentis plus rien. Je voulais me retourner, mais mon corps refusait d'obéir. Pourquoi ? Était-ce dû à mon état de choc ? Oui, ça devait être cela... Lorsque j'ouvris les yeux, il se trouvait juste devant moi. Je poussais un petit cri et le fixais, car je ne pouvais rien faire d'autre. Un hurlement d'un loup retentit. Oh... un... un loup ? C'était pourtant impossible qu'il y en ait un ici. L'homme regarda dans la direction du bruit, et son attention se détacha de moi. 
Je pus enfin bouger. Je ne pris pas le temps de réfléchir, et profitais de l'occasion pour partir en courant vers la falaise. Je ne pouvais pas m'enfuir, il me rattraperait. Alors, espérons qu'il ne soit pas assez fou pour me suivre... Je posais rapidement mon regard sur le lac en contrebas. Je mourrais de toute façon, alors, autant essayé. Je fermai les yeux, pris une grande inspiration et me jetai dans l'eau. La descente dans le vide fut absolument terrorisante, et sûrement une des pires expériences de ma vie. Elle sembla durer si longtemps... J'ouvris les yeux, baissa le regard, et heurta la surface du lac.

          PDV – Inconnu.

C'est un loup-garou, je le sens. Je regarde dans la direction du son, qui paraît loin : mais sait-on jamais. J'essaye d'entendre autre chose, mais rien ne me vint. À part... à part la demoiselle, Catlyn, qui essayait de s'enfuir. Je prends mon temps pour la rejoindre au bord de la falaise, quand je la vois soudainement sauter. Surpris, je ne réagis pas tout de suite. Elle n'a pas beaucoup de chance de survivre à cela... 
Même aucune, en fait. Je soupire et saute moi aussi. J’atterris un peu plus loin, sur le sable mouillé. Je pose mon regard sur l'eau, mais la fille ne semble pas remonter à la surface.

Frustré, je pousse un grognement. Je la laisse ou je la tue moi-même ? Peut-être qu'elle est déjà morte. Mais, je dois m'en assurer. Je vais alors moi aussi dans l'eau, et nage – à vitesse vampirique- jusqu'à l'endroit où elle est tombée. Je plonge et la récupère, inconsciente. Une fois hors de l'eau, je la laisse tomber sur le sable -qui ressemble plus à des graviers- et l'observe en me penchant sur elle. 
Elle tousse, essaye de reprendre ses esprits, son regard vert fixé sur moi. Le temps semble ralentir, quand soudainement elle m'enfonce une pierre pointue dans la gorge. Je lève la tête sous la douleur, quand j’entends une petite voix presque imperceptible s'élever.

- Si je meurs, t-tu meurs avec moi...

Je pousse un petit rire, et ma plaie se referme d'elle-même. Quand je reporte mon attention sur elle, je la vois à demi inconsciente.
Elle essaye d'ouvrir les yeux, je le sens, mais ses forces l'ont désertée. Je secoue la tête et mon petit sourire revient se planter sur mon visage. Finissons s'en ! Je me penche sur son visage, observant ses traits fins. Je sens contre moi son petit cœur battre faiblement. Elle recrache un peu d'eau, et garde la bouche entre ouverte. Toujours penché sur elle, je plante mes canines dans la peau de son cou et le vide presque de son sang. Comme pour les autres filles, je regarde ses yeux s'ouvrirent finalement, et son regard s'éteindre pour toujours. 
Une fois que son fragile cœur d'humaine s'arrête enfin de battre, je disparais dans la nuit.

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Deux heures plus tard...

 
             PDV – Externe.

 
La jeune Catlyn avait lâché son dernier souffle depuis un moment déjà. Seulement, ce que Klaus -c'était effectivement le nom de l'homme- n'avait pas remarqué, c'était qu'avant que sa plaie se referme, quelques gouttes de son sang s'étaient introduite dans la bouche entre ouverte de la fille. Cat avait donc bu un peu de sang de Klaus avant de mourir. Je suppose que vous pouvez imaginer la suite...
La jeune fille se redressa d'un coup, reprenant son souffle. Elle était complètement perdue, mais surtout, elle avait soif. Oh oui, elle avait même très très soif. Elle se releva pour se mettre debout, et le bruissement des graviers en dessous d'elle retentit tellement fort à ses oreilles qu'elle grimaça. Elle leva la tête vers le haut de la falaise, le regard encore perdu, et esquissa un pas. Elle se retrouva alors à côté du vide, en face du feu de camp éteint. Ses yeux s'écarquillèrent de surprise, et elle regarda l'endroit où elle se tenait auparavant. Les pensées se bousculaient dans sa tête, sans qu'elle puisse réfléchir clairement.

Puis une odeur enivrante envahit ses narines, et elle se retourna doucement. Elle aperçut le corps d'Eden à quelques mètres. Malgré elle, des canines apparurent dans sa bouche et ses yeux virèrent au rouge. Elle se déplaça jusqu'à son amie, à vitesse vampirique.

Elle était devenue une vampire... Mais était-ce la seule chose qu'elle était ?